Sorties botaniques 2002

Dominique BARREAU et Henri CASTEL

28 avril 2002 : Lapalme

La sortie commence par une visite aux Coussoules de Lapalme, mais il faut être accompagné d’un des propriétaires car ces terrains sont fermés aux promeneurs.M. Francis Jalabert nous ouvre ce petit domaine où des vignes autrefois plantées ont été abandonnées à cause du sel. Nous progressons dans une ambiance un peu étrange, au milieu de petites parcelles très sableuses ombragées de pins d’Alep. Nous y trouvons pas mal d’espèces attendues comme la germandrée des dunes (Teucrium dunense) et Euphorbia terracina, ou plus étonnantes comme Fumana ericoides et surtout le ciste de Montpellier. Peu d’orchidées avec seulement deux espèces : Barlia robertiana et Serapias vomeracea.En approchant de la voie ferrée dans un milieu un peu plus humide un gaillet attire notre attention, il est assez grêle et particulièrement accrochant, c’est Galium spurium que nous n’avions pas encore retrouvé dans l’Aude. Pour déjeuner, nous sortons du domaine et nous nous installons sur une petite langue de sable regardant vers l’ouest, nous notons au passage l’ombellifère épineuse, Echinophora spinosa et divers statices : Limonium ferulaceum, Limoniastrum monopetalum... Et aussi une plante bizarre à tige très large et aplatie, il s’agit d’un phénomène de fasciation sur Matthiola sinuata. Nous revenons vers le village dans un secteur où naissent plusieurs exsurgences. A l’exsurgence de la Valentine apparaissent quelques plantes des milieux humides : Carex extensa, Samolus valerandi, Zannichellia palustris... L’exsurgence de la Combe Roussel forme un ruisseau assez large avec d’intéressantes espèces naturalisées comme Periploca graeca et la réglisse (Glycyrrhiza glabra). M. Besançon nous fait découvrir également la lavatère de Crète (Lavatera cretica). Puis nous nous engageons sur la petite colline située au-dessus de Combe Roussel en direction des Cortals d’Aval avec en haut un grand reboisement en pins parasols. Nous y notons nombre de plantes classiques de la garrigue, mais aussi quelques espèces plus remarquables comme Fumana laevipes, Medicago disciformis et M. suffruticosa, et la discrète polygale de Montpellier. Au retour nous passons au-dessus des ruines d’un des anciens villages de Lapalme, appelé Glavanel, abandonné pour une raison inconnue. Une gesse y fleurit en grande abondance, c’est Lathyrus setifolius. Haut de page

12 mai 2002 : Embres

Continuant notre exploration des Corbières Orientales, nous découvrons un secteur de garrigue à l’est d’Embres. Guidés par Lionel Belvèze, originaire du village voisin de St-Jean-de-Barrou, nous pénétrons dans la Combe de Laval. Elle est parcourue par un étroit chemin et montre sur son flanc nord des reliefs ruiniformes caractéristiques des calcaires dolomitiques. Le fond du vallon est relativement frais avec même quelques noisetiers et du grémil bleu. Les premières falaises montrent déjà une flore intéressante avec l’alysson épineux, la campanule remarquable, le centranthe de Lecoq... Le chemin est envahi de buplèvre ligneux et d’une grande graminée, Piptatherum paradoxum. Nous quittons ce chemin et commençons la montée vers la crête côté sud. Il existe un passage entre les falaises mais la pente est assez raide et nous progressons difficilement dans les cailloutis. Quelques espèces y ont trouvé un peu de fraîcheur comme la mélitte, la primevère, le daphné lauréole et le houx (un seul pied pour ces deux derniers). Arrivés sur la crête, nous déjeunons et seuls les moins fatigués continuent la montée vers le sommet (point 604 m).
Largement récompensés de nos efforts, nous arrivons sur un ensemble de pelouses assez terreuses riches en plantes annuelles. Certaines sont fort rares comme Torilis leptophylla, Rhagadiolus edulis ou plus communes comme Scandix australis. Ces terrains sont aussi favorables aux liliacées avec la tulipe et la fritillaire. Un sédum nous intrigue car il ressemble au sédum rupestre, mais nous avons pu vérifier à la floraison qu’il s’agit de Sedum ochroleucum sous une forme très robuste à feuilles non imbriquées. Sur les rochers la saxifrage des Corbières, la linaire à feuille d’origan et aussi une plante recouvrante, Paronychia kapela. Des genévriers prostrés se révèlent être des genévriers communs donc ils sont ici en limite est des Corbières. Près du sommet et sur la crête qui se poursuit vers le sud, les conditions sont encore plus favorables à certaines espèces inhabituelles dans les garrigues chaudes, ainsi Sorbus aria, Valeriana officinalis, Geum sylvaticum, Thalictrum minus, Lathyrus filiformis, Noccaea caerulescens, Ranunculus gramineus. Nous quittons à regret cet endroit où le temps nous a manqué pour une meilleure prospection.Haut de page

9 juin 2002 : Fourtou
C’est par un temps couvert, humide et froid que nous nous retrouvons peu nombreux au col de la Fage. Notre intention est de suivre la piste forestière qui mène au Pech de la Paille. Elle suit, entre 800 m et 900 m, une série de crêtes à dominante calcaire et rejoint à l’est le col de la Redoulade. Dépassant le Trou de la Reilhe, nous faisons un premier arrêt sur une pelouse assez riche en orchidées : Serapias vomeracea, Gymnadenia conopsea, Coeloglossum viride... Une luzerne vivace, Medicago hybrida y est commune. Puis nous arrivons à une première petite crête où nous notons encore de nombreuses espèces poussant parmi les buis, ainsi Euphorbia duvalii, Ranunculus gramineus, Crepis albida, Lactuca perennis... Le long de la piste nous avons été assez surpris de voir deux pieds isolés de santoline qu’on trouve normalement bien plus bas. Le temps s’est arrangé et pour notre déjeuner le soleil nous réchauffe enfin, le vent restant toujours aussi fort. Puis la piste passe dans une hêtraie et les talus sont couverts d’érine alpine. Nous arrivons sous le Pech de la Paille couvert d’une végétation basse, mélange de buis et de hêtres rabougris. Plusieurs espèces attirent notre regard comme Fritillaria nigra, Thalictrum minus, Noccaea montana. Au sommet une petite touffe de Paronychia kapela déjà rencontrée à la sortie d’Embres. Nous sommes dans une ambiance assez proche de celle du Milobre de Massac avec Aster alpinus, Bupleurum ranunculoides, Anthyllis montana. Mais l’influence méditerranéenne s’y atténue car, par exemple, on n’y trouve pas Genista pulchella, mais une forme prostrée de Genista pilosa. Une belle centaurée bleue nous intrigue, proche de la centaurée de montagne, mais avec des bractées à bordure brun clair c’est Centaurea triumfetti, espèce rare dans les Corbières. Le versant sud-est semble plus humide mais devient vite impraticable, nous y voyons les fruits caractéristiques du perce-neige.

Au retour nous nous arrêtons brièvement dans la hêtraie avec son cortège classique : Allium ursinum, Lamium maculatum, Stachys alpina... Puis nous cherchons à atteindre une petite falaise située au nord de l’Avetouse. Elle abrite quelques espèces intéressantes comme Campanula speciosa, Alchemilla pallens. Nous terminons par la visite d’un petit étang (artificiel ?) au- dessous de la piste avec quelques plantes aquatiques : Typha latifolia, Alisma lanceolatum, Callitriche stagnalis. Haut de page

30 juin 2002 : forêt de Boucheville
Cette forêt domaniale située au sud-est de l’Aude a son versant ouest dans notre département et son versant est dans les Pyrénées-Orientales. Cette dernière excursion de l’année prévoyait la traversée du massif en suivant la route forestière partant du col d’Aussières. Nous commençons par explorer une petite zone de prés marécageux au col. Les espèces sont des classiques des lieux humides de montagne : Lotus pedunculatus, Crepis paludosus, Carum verticillatum, Dactylorhiza maculata. En descendant le versant est (encore dans l’Aude), c’est une lande à sarothamne avec callune et genévrier commun. On y rencontre des espèces acidiphiles : Jasiona montana, Prunella hastifolia, Centaurea pectinata, Armeria plantaginea et aussi des annuelles communes sur les crêtes de la Montagne Noire mais assez inattendues ici : Ornithopus perpusillus, Teesdalia nudicaulis, Arnoseris minima. Nous empruntons ensuite la piste qui suit à peu près la courbe de niveau 1000 m. Elle traverse au début un bois de pins sylvestres dont les clairières sont couvertes de magnifiques buissons de ciste à feuille de laurier. Tout le long de la piste nous ferons plusieurs arrêts dans la forêt de hêtres et de conifères dont les bords sont émaillés de myrtilles et de fraises. Diverses plantes fréquentent les lisières : Prenanthes purpurea, Laserpitium nestleri, Luzula nivea, Campanula persicifolia, Epipactis atrorubens et même à des endroits plus secs et mieux exposés des méditerranéennes comme l’astragale de Montpellier, l’anthyllis vulnéraire, Galium maritimum, Centranthus lecoqii, Stachys recta. Ce qui rend d’autant plus étonnantes quelques touffes de rhododendrons ! Nous pourrons aussi faire la différence entre deux ombellifères assez proches, Pimpinella saxifraga et Ptychotis saxifraga, cette dernière à involucelle foliolé et bisannuelle des lieux arides. Nous déjeunons au col du Lhadet. Une petite visite à la hêtraie montre les espèces typiques : Daphne laureola, Polygonatum multiflorum, et même quelques pieds de lis martagon. Cette hêtraie est sans doute assez humide et fraîche pour y héberger Actea spicata. C’est aussi l’occasion de la découverte de quelques pieds de botryche en situation tout à fait anormale dans le sous-bois, de plus il ressemblerait plus au très rare Botrychium simplex plutôt qu’au B. lunaria ! Sur la lisière : Atropa belladona, Coronilla emerus, Linum catharticum, Festuca gautieri. Un autre arrêt plus bas montre d’autres espèces comme : Stachys alpina, S. sylvatica, Astragalus glycophyllos, Epipactis microphylla et Trifolium medium. Nous arrivons au Roc de la Jeanno Grando. Cet endroit nous offre un magnifique point de vue sur la vallée de la Boulzanne depuis Gincla jusqu’à Salvezines. Pour la végétation le contraste est brutal, car nous sommes ici sur des terrains calcaires assez escarpés et bien plus secs qu’avant, avec même du chêne vert. Nous avons la surprise d’admirer une station d’un ononis buissonnant aux belles fleurs roses (Ononis rotundifolia), localité unique dans l’Aude non revue depuis Gautier. Des espèces classiques de ces milieux sont également notées comme le raisin d’ours, la seslérie, Globularia nudicaulis, Teucrium aureum, Valeriana montana. La piste commence à descendre et devient caillouteuse. A la bifurcation avec celle qui remonte vers le col de la Bène, apparaissent des bruyères arborescentes et des lis martagon, et encore plus bas Trifolium rubens. Près de notre point de stationnement à Gincla, nous découvrons dans des rochers un rare longicorne aux élytres bleu-cendré barrés de taches noires : Rosalia alpina.