Le peuplement du bassin de Sigean du Paléplithique supérieur au Mésolithique
PALÉOLITHIQUE SUPÉRIEUR - MÉSOLITHIQUE
Le bassin sédimentaire Oligo-Miocène qui entoure
l’étang de Bages est enchâssé dans les nappes de
charriage mésozoïques des Corbières orientales (La
Clappe, Font-Froide, Port-la-Nouvelle). Les études
géologiques des étages lacustres du Tertiaire,
des plages marines du Quaternaire ainsi que des
deux nappes alluviales de l’Aude et de deux petits
affluents côtiers, la Berre et le Rieu furent complétée
plus récemment en liaison avec l’archéologie par
des analyses géomorphologiques sur les épais
remplissages holocènes. Ce lien fut assurée dans
le cadre d’une ATP (Ambert 1995). D’autres études
concernant l’Holocène du littoral sont en cours.
La connaissance archéologique du bassin concerne
au premier chef la Protohistoire et l’Antiquité. La
Préhistoire de ce secteur est surtout connue pour
avoir livré différents faciès de silex en plaque dont la
meilleure connaissance pétrologique (Pauc et al. 2004,
2006, Grégoire et al. 2010) découle aujourd’hui d’une
forte implication dans l’étude des industries régionales du Paléolithique ancien et moyen (pour les Pyrénées-Orientales, Caune de l’Arago, La Joliette et pour l’Aude,
les Ramandils) et au contraire de leur faible impact au
Néolithique final-Chalcolithique dans la circulation des
grandes lames (Vaquer 2006). Pour ce qui concerne
le Paléolithique supérieur, les sites des Espassoles
(Solutréen) et du Rec del Penjat (Magdalénien ancien),
à Vingrau dans les P.-O., par exemple, font état d’une
utilisation massive de ces roches.
Le but des prospections conduites à l’embouchure de
l’Aude dans la Méditerranée, dans cette zone riche en
matière première, est donc de retrouver les sites que
les chasseurs-cueilleurs préhistoriques peuplaient
lors de leur déplacement vers l’Aquitaine ou vers les
Pyrénées, et ce jusqu’aux débuts de l’Holocène.
D’après les reconnaissances ponctuelles opérées en
2010 dans les communes de Peyriac, Sigean, Portel
et Roquefort, ce sont des industries moustériennes
qui sont les plus abondantes en surface, en particulier
sur les communes de Roquefort et de Sigean. Un site
d’habitat (silex brûlés) de cette séquence est établi
sur un lambeau de haute terrasse, en amont du défilé
du Rieu. Il livre une industrie copieuse qui utilise aussi
des galets de quartz patinés. Les sites avérés du
Paléolithique supérieur sont par contre rares en raison
de l’absence d’outils, mais l’habitat est également
attesté dans cette zone par une industrie riche en
burins, sans doute déplacée sur une pente, au sud de
Roquefort. Une armature trapézoïdale et des restes de
débitage attestent que les terrasses de la Berre étaient
fréquentées au Mésolithique final.
En l’état de la recherche cependant, l’essentiel des
industries jouxtant les gîtes de matière première se
présente sous forme de faciès d’atelier, avec ce que
cela implique sur la diachronie et les mélanges (site
du Pré d’Audène, à Portel). Une difficulté s’incarne
dans le fait que les ébauches de grandes pointes
bifaciales du Solutréen des Espassoles, à Vingrau (P.-
O.), ont visiblement été taillées sur l’habitat même en
Roussillon à partir de plaquettes ramenées de l’Aude,
sous forme des deux principales variétés reconnues
dans le bassin de Sigean. Cela peut expliquer l’absence
d’ébauches de ces pièces caractéristiques près des
gîtes de matière première. De plus, les propriétés
intrinsèques de ces silex du Tertiaire lacustre, toujours
très fissurés, font que le débitage est bien mieux
maîtrisé en travaillant sur les surfaces que dans le
volume à partir des tranches, y compris pour les lames
au-delà de 5-7 cm. Cela implique une difficulté pour
discriminer le débitage laminaire moustérien de celui
du Paléolithique supérieur sur la base des cassons et
de rares nucléus délaissés. Seuls deux sites ateliers
assez homogènes de cette dernière séquence ont été
pour l’instant repérés à Peyriac et Roquefort.
La poursuite des recherches devrait permettre une
meilleure compréhension du peuplement préhistorique
de ce vaste secteur.
Michel MARTZLUFF
Laboratoire JE MEDI-TERRA de l’Université de Perpignan