Daas son article hebdomaire, notre sociétaire Claude Marquié évoque l’époque où la Dépêche du Midi était dirigée par deux audois. A lire sur le journal (édition de l’Aude) du 27 septembre 2020 ou à consulter sur le site du journal
Quand deux Audois dirigeaient La Dépêche (1894-1943)
Née le 2 octobre 1870, La Dépêche tira bientôt à 200 000 exemplaires, arrivant en seconde position dans la presse de province, tout en manifestant des positions avancées, réclamant notamment la séparation des églises et de l’état. En 1894, Arthur Huc (1854-1932) devient rédacteur-en-chef : né à Sigean, ce juriste avait entamé une brillante carrière dans les cabinets ministériels et la préfectorale, avant d’opter pour le journalisme. Dans sa nouvelle profession, sa compétence lui permet de réaliser un journal d’opinion, illustré par des plumes telles que Clemenceau ou Jean Jaurès, qui se différencie de la presse à sensation de l’époque, mais il se révèle également un critique d’art inspiré, encourageant Toulouse-Lautrec aussi bien que Maurice Denis ou Alfons Mucha. Anticléricalisme intransigeant
Il s’affirme comme un redoutable polémiste, soutenant que les préfets doivent s’engager à fond en faveur des vrais candidats de la République, n’hésitant pas à affronter en duel le préfet de l’Aude Beverini-Vico. Son anticléricalisme intransigeant fait que des évêques considèrent bientôt comme un grave pêché la lecture de son titre. Or, A. Huc était marié à une riche héritière marseillaise dont la sœur épousa le futur sénateur de l’Aude Maurice Sarraut (1869-1943), qui entre au journal en 1892. Il fait de La Dépêche un redoutable instrument politique dès qu’il devient directeur de la rédaction parisienne, et à partir de 1909, dirige aux côtés d’A. Huc le quotidien dont les deux beaux-frères sont les principaux actionnaires.
Durant l’entre-deux-guerres, La Dépêche a une influence nationale, Maurice Sarraut conseille les chefs de partis, fait et défait les ministères, reste fidèle à l’anticléricalisme et à l’entente radicaux-socialistes, tout en défendant des gouvernements dans lesquels figure souvent son frère Albert. Cependant, des difficultés financières aboutissent à l’entrée dans le capital du groupe de Jean-Baptiste Chaumeil, entrepreneur de Travaux Publics à Valence d’Agen, dont le neveu Jean Baylet devient rédacteur-en-chef puis directeur de 1947 à 1959 du journal. Ainsi s’était clôturé le « cycle audois » de ses dirigeants.
Claude Marquié
Bibliographie : Les Audois, Dictionnaire biographique, Sesa 1990.